image/svg+xmlLA RÉVOLUTION ALLEMANDEET LE SPECTRE DU PROLÉTARIATL’histoire Depuis qu’un nouvelle génération de critiques remet en cause lemouvement ouvrier officiel, y compris sa gauche et son «gauchisme», en lesconsidérant comme mouvement et courant du capital, après l’énièmeconfirmation de leur rôle durant les événements des années 60, de Watts à Pariset à Gdansk, une recherche approfondie est devenue nécessaire pour situer, dansle contexte historique du développement de la société capitaliste, la tradition dumarxisme de la seconde Internationale, puis de la social-démocratie. La redécouverte de la guerre civile espagnole, du mouvement réel,englobant la révolution russe et d’autres événements mineurs de l’histoire de larévolution (histoire qui aujourd’hui ne se donne plus les limites de l’époque ducapitalisme naissant et mûr, comme le voulaient Marx et Bordiga), a rapidementmis ceci en évidence: l’histoire de la révolution allemande était d’importanceexceptionnelle en raison du développement capitaliste de la zone allemande, parrapport aux autres expériences historiques (Russie, Finlande, Hongrie, Italie,Chine et puis Espagne).
image/svg+xmlLes faits qui intéressent ici et dans les deux partie successives decette introduction, sont ceux que l’on peut appeler «de rupture», car ils tendentà rompre avec l’establishment politico-syndical des divers courants, partis etorganisation du socialisme allemand officiel (social-démocratie et centriste, puisaffilié à la III° Internationale) ou bien avec le mouvement ouvrier.Actuellement, - avec une exception – l’histoire du mouvementrévolutionnaire allemand est écrite au niveau des organisations1; c’est-à-dire desformes de représentations que ce mouvement s’était données et qui se sontautonomisées; en effet, elles ne furent des facteurs subjectivementrévolutionnaires que pendant quelques mois, durant la courte période qui va de1918 au printemps 1921, laissant par là à toutes ses formes politiques etmilitaires, en dehors de ses temps forts, une fonction stabilisatrice etorganisatrice au niveau politico-économique. Cette fonction révèle le contenu possible et donc souvent réalisé dumouvement comme gauche radicale du capital; en réalité, à part quelques brefsmoments de confrontation (qui ont malgré tout révélé une très importanteagressivité parmi certains groupes de prolétaires), les formations de la gaucheallemande ont eu pour but réel d’assurer la survie sociale d’une partie de laclasse dont elles étaient l’expression, c’est-à-dire, des catégories les plusradicales du prolétariat. Cela signifiait évidemment, se poser des problèmes quin’étaient pas ceux d’une révolution entièrement anticapitaliste, mais seulementceux d’une révolution contre la misère capitaliste d’alors. En laissant hors de ce discours un jugement «réaliste» quiaccepterait les «conditionshistoriques» et qui limiterait la critique – et parconséquent la perspective peut-être possible aujourd’hui –, on peut montrer danscette révolution, un caractère double; et cela, même lorsque sa gauchecommuniste rompait avec les partis ouvriers, avec le parlementarisme, avec lessyndicats et les conseils d’ouvriers et de soldats, surgis à la fin de la guerre et
image/svg+xmlfonctionnant immédiatement comme la base démocratique «directe» pour uneconstitution social-républicaine. Ce double caractère nous apparaît évidemment aujourd’hui, à nousqui connaissons la fin de cette révolution; mais il est clair, également, que lafonction des organisations (Unionen et Betriebsräte) que s’étaient données lesmasses les plus radicales du prolétariat et qui quittèrent les syndicats officiels,même étant affiliés à la III° Internationale, fut toujours ambiguë; elles seconstituèrent très tard (1919-1920)2et dans ce contexte de revendicationsautogestionnaires de la vie économique – revendications nécessaires en raisondu caractère bien particulier des catégories en question, qui devaient vaincre lamisère matérielle en assurant, même violemment, la remise en marche del’appareil productif allemand, largement atteint par la crise de l’après-guerre. Le mouvement radical allemand n’a pas eu, par conséquent, uncaractère économico-revendicatif (syndical), mais un caractère (de construction)gestionnaire (conseilliste), car l’économie était à reconstruire. Et c’est là quel’on voit combien cette expérience est restée prisonnière d’une réaction denégation à l’ordre capitaliste traditionnel et tendant à la réalisation de l’êtreimmédiat du prolétariat. Il n’y eut donc aucune perspective de dépassementpositif, par le biais de l’autonégation de la classe prolétarienne capitaliste. Outre les limites du mouvement radical même, qui n’a pas dépassé– selon les historiens – 500.000 prolétaires regroupés dans les «Unionen»3, ilfaut également introduire un autre facteur défavorable, avant d’achever l’étudedu travail des «Linksradikalen»: la révolution russe.Il s’agissait là d’une révolution ayant pour but capitaliste, ledéveloppement intensif d’une économie industrielle très jeune; car la classebourgeoise n’avait pas la force et l’audace de la faire avancer (au milieu des
image/svg+xmlproblèmes posés par la guerre) et préférait maintenir des conditions propres àempêcher même le processus de reproduction de la force de travail ouvrière,précipitant ainsi la Russie dans une situation quasi pré-industrielle; dans cetterévolution, la classe ouvrière fut la seule catégorie capitaliste à avoir une volontéhistorique suffisamment radicale pour faire sauter les dispositifs archaïques etouvrir la voie à une accumulation capitaliste stable et moderne, sans classebourgeoise au sens classique toutefois, et en cherchant à assurer par elle-mêmela gestion et la planification. (Par la suite, à cause de la guerre, du marché, de lastructure économique russe et du retard politique de la bourgeoisie mondiale,cela ne fut réalisé qu’en passant d’une gestion ouvrière à une gestion despotiqued’état, par le biais du capital anonyme; la mimique des hommes était changée,mais non leur soumission à la logique de la société capitaliste).Comme toute rupture, la rupture russe a mis hommes et sentimentsen mouvement: les soviets et les conseils, ainsi que les courants de la révolution(les bolcheviks de gauche, puis les anarchistes), furent compris commel’expression d’une nouvelle créativité révolutionnaire; cependant, en raison deleurs limites historico-sociales (à en juger par la forme de représentationdominante choisie par ce mouvement, le parti bolchevique, ambigu même d’unpoint de vue capitaliste, Zinoviev et Lénine!), ils ne réussiront pas – même ence qui concerne la vision mondiale – à couper le nœud gordien de la politique:indépendance nationale, parlementarisme, politique de front, pour ne pas parlerde tout le formalisme organisatif, comme le montre la critique de Gorter, mêmesi – tout comme ses contemporains – il se meut dans le monde des expressions,formations politiques, sans arriver à en critiquer le contenu réel. La rupture russe fut donc un facteur d’élan révolutionnaire, maisson caractère gestionnaire et politique a immédiatement donné le ton à larévolution mondiale; la révolution allemande ne parvint pas à dépasser cela, etde plus, ce développement capitaliste en Russie suivit un cours parallèle à la
image/svg+xmlrécupération du mouvement ouvrier par le capitalisme en Allemagne. Cetterécupération eut lieu grâce à l’autogestion ouvrière et à la démocratie , cettetentative audacieuse fut un échec comme on le vit par la suite, lorsque cecapitalisme dut centraliser toutes les forces pour résoudre les problèmes desannées vingt et trente qui préparèrent la solution finale, à savoir, la secondeguerre mondiale.Le recul historique qui nous sépare des événements allemands, enrévèle toutes les limites; mais une étude approfondie de sources moins connuesmontrerait peut-être que l’atmosphère fut beaucoup plus radicale dans lemouvement spartakiste, dans l’armée rouge de la Ruhr, dans les bandes de Hoelzet à la Leuna-Werk que les programmes et les directives gestionnaires, dominanttotalement la vie théorique et politique du mouvement révolutionnaireallemand4, ne le laissent entendre. La critique de Gorter Déjà, avant la guerre de 1914-18, Hermann Gorter avait entreprisune critique radical-réformiste typique que la gauche affiliée à la II°Internationale, qui comprenait également Anton Pannekoek et RosaLuxembourg. Cette gauche, tout en restant complètement à l’intérieur duformalisme de classe, du parlementarisme et de la vision «trade-unioniste-déléoniste», cherchait un expédient révolutionnaire subjectif et semblait l’avoirtrouvé dans l’agressivité spontanée du prolétariat. Pendant la guerre, cette tendance se rapprocha de la gauche russe etmême si elles n’étaient pas tout à fait en accord, elles formèrent les courants dela gauche de Zimmerwald: défaitiste et antimilitariste plus que clairementrévolutionnaire. Vers la fin de la guerre (1917-18), ces gauches allemande et
image/svg+xmlhollandaise (divisée en Allemagne en «Bremerlinke», puis en SocialistesInternationalistes et Spartakistes) soutinrent les bolcheviks en tant que dirigeantsd’une révolution qu’eux-mêmes considéraient comme anti-bourgeoise etprolétarienne – ce qu’elle fut, mais jamais dans le sens qu’ils espéraient. C’est seulement avec les directives tactiques de la III°Internationale et avec la politique extérieure de l’Etat soviétique qu’ils prendrontconscience de la ligne social-démocrate classique du parti bolchevique, sanstoutefois en comprendre au fond le pourquoi. Il y eut l’attaque de Lénine contrel’extrémisme et les réponses de Pannekoek et de Gorter5. Au cours de ces polémiques et après les expériences allemandes,cette critique que l’on peut lire dans le texte de Gorter prend forme et on peut larésumer par les points suivants (tout en en donnant en même temps les limites): 1 – La révolution communiste a pour centre les pays de hautdéveloppement capitaliste, ou bien ceux de l’Europe occidentale et des états(orientaux) américains. Les leçons importantes sont pas conséquent ici et non enRussie, la tactique internationale serait fixée par les communistes«occidentaux», c’est-à-dire: opposition au parlementarisme, aux chefs et àl’entrisme dans les syndicats. Ici, comme dans toute l’analyse des communistesallemands et hollandais, la fonction capitaliste de la social-démocratie n’étaitpas claire: on comprenait vaguement qu’elle jouait un jeu bourgeois, que le rôledu tribun parlementaire comme celui de la figure paternaliste du chef de lahiérarchie du parti et du syndicat n’avait rien de révolutionnaire. Maisl’antiformalisme ne se donna jamais une base théorique qui dépasse lesarguments à fond démocratique. On les trouve trop souvent dans la critique de laGauche Communiste Allemande, comme on trouve également dans laconception du parti (KAPD)6, une vision d’avant-garde, mêlée à des éléments
image/svg+xmlilluministes qui évoquent les idées de Tasca et de Gramsci. Cette conception duKAPD et de Gorter se trouve par conséquent à l’intérieur de la traditiond’origine russe (bakounino-léniniste) concernant le parti, et dont lescommposantes dominaient la gauche communiste de cette époque, à savoir:démocratisme et centralisme «prolétairen» dans le KAPD, didactisme etblanquisme (gauche du VKPD7et du PC d’Italie). Face à l’influence de cette tradition liée historiquement auxtraditions jacobines et maçonniques, il y eut la tradition travailliste – du type dela I° Internationale – qui avait continué, bien qu’avec une portée théorique peuimportante, dans le syndicalisme; elle ne vit surgir à la fin de la révolutionallemande, qu’une Union Unitaire (AAUE), qui voulait l’usine comme base aulieu de la profession et qui soutenait, au niveau du programme, un ouvriérismeanti-parti. 2 – L’autonomie du prolétariat a été un point commun à la GaucheAllemande et à la Gauche Italienne, et a été confirmée par leur hostilitécommune envers les «fronts ouvriers» et l’apologie de l’unité, même si laGauche Italienne, historiquement en retard, voulait accepter un «front uniquesyndical». 3 – L’opposition aux fronts, dans les pays à haut développementcapitaliste est suivie dans les pays asiatiques, où la critique et la perspicacité deGorter sont uniques pour son époque. Une expérience avait déjà eu lieu enTurquie, mais ce fut seulement après la défaite de la révolution chinoise qu’oncommença, dans la III° Internationale, à critiquer la soumission descommunistes aux organisations national-bourgeoises. Gorter comprenait également les raisons de cette politiqueextérieure bourgeoise menée par l’Etat soviétique et sa critique de la paix deBrest-Litovsk fut juste, bien qu’incomplète, car il ne connaissait pas l’opposition
image/svg+xmlcommuniste à cette paix qui abandonna les mouvements prolétariens et/oucommunistes, dans la Baltique, en Finlande et en Ukraine, à la répressionallemande et bourgeoise locale, au nom d’une unité national-démocratique queles bolcheviks de droite considérait comme prémisse historique aux révolutionscommunistes.4 – Gorter fut, de la même manière, parmi les premiers àcomprendre la révolution russe comme révolution double, bien que restantprisonnier d’une logique gestionnaire et ouvriériste; il voyait comme mesuresprolétariennes anticapitalistes, les mesures qui avaient au contraire pourfonction, une réorganisation et une centralisation de l’économie; le butimmédiat étant d’assurer la reproduction de la force de travail ouvrière (cf. le«collectivisme de la misère» de Gramsci en 1917!). Le facteur principal pour une domination bourgeoise sur lesévénements prolétariens de la révolution serait, d’après Gorter, les paysans. Il necomprit pas le rôle du capital agraire comme base d’un programmed’industrialisation; il crut, en revanche, que les revendications pour la terreavancées par les paysans, auraient affaibli le prolétariat, c’est-à-dire, l’industriedes villes, en déplaçant le poids économico-politique à la campagne. Une tellefaçon de poser la question ne voyait pas que le développement russe suivait lalogique d’un capital désormais anonyme. La problématique importante des vieilles communautés decampagne8était inconnue à Gorter; elle aurait amené – en même temps qu’uneanalyse qui aurait été fondée sur une révolution internationale et sur une visiond’opposition à l’industrialisation de la Russie – tout le discours de la gaucheallemande et russe sous une autre lumière. Par suite de cela, de nombreux problèmes sont mal posés. Gorterfait une appréciation erronée du rôle des bolcheviks, puisqu’il considère que
image/svg+xmlc’est eux qui avaient l’initiative révolutionnaire en octobre 19179. Le grandchangement en Russie survient, d’après Gorter, en 1921, quand la dominationpaysanne et bourgeoise est devenue totale avec la NEP et avec Kronstadt,révolte que Gorter considérait comme l’expression explosive de la dualité de laRussie révolutionnaire. Après cette critique, Gorter peut conclure que la Russie, la III°Internationale, la social-démocratie et mes mouvements démocratiques d’Asiesont à considérer comme des ennemis de la révolution. Trois points plus généraux du discours de Gorter sont à souligner: -Sa fois en une révolution toujours possible pendant une crisemortelle pour le capitalisme (en admettant en même temps quele monde entier constitue un ennemi pour la révolution, leprolétariat y compris, comme nous le verrons…)-Son formalisme organisatif, conseilliste et gestionnaire, quil’amena à la formation de l’Internationale CommunisteOuvrière, et qu’il n’osa pourtant pas appeler «parti historique»comme le fera plus tard le bordiguisme de gauche, à l’occasionde la création volontariste d’une autre Internationale, le PartiCommuniste Internationaliste. Même si Gorter a soulignél’importance de la critique et de la préparation théoriques destrois KAP de son Internationale (de Essen, de Holland et deBulgarie, tendance de Sofia), une des raisons importantes de lascission du KAPD10, fut justement la création de cetteInternationale comme celle de la révolution future. -Enfin, son acceptation totale (encore vive aujourd’hui dans lesdiscussions entre les idéologies entre les idéologies de l’ultra-
image/svg+xmlgauche) de la contradiction fictive entre gestion conseilliste etgestion d’Etat et de parti. Le spectre du prolétariat Un spectre erre dans l’histoire des révolutions: c’est le spectre duprolétariat; tout d’abord attendu comme le Messie qui viendrait enfinrécompenser les sacrifices offerts au capitalisme progressiste, unificateur,centralisateur et industrialisateur; on le voit ensuite, au contraire, apparaître encostume social-démocrate, participant aux guerres impérialistes et aux électionsparlementaires, vivant et acceptant le rythme de la société du capital:production et consommation pour la reproduction de la force de travail pour unenouvelle production… demandant de temps en temps des augmentations de sapart de la valeur produite, plate-forme quantitative à potentialité qualitativerévolutionnaire, grâce au saut de la gymnastique de classe… Le prolétariat mondial est pour Gorter «hostile au communisme»;toutefois, prisonnier d’une logique autogestionnaire et productiviste, il attend dumême prolétariat la libération humaine, effectuée par la lutte de classes dont ilest le premier à reconnaître les limites revendicatives et réformistes. Quichangera cette contradiction? L’histoire! Grand a-priori passe-partout del’ultra-gauche. C’est ainsi que Gorter s’explique tous les lieux communsmarxistes: en 1848 «une révolution prolétarienne» n’était pas possible, maismaintenant! on attend la conscience-Godot11. Le gestionnaire «unitaire» allemand Otto Rühle12, en critiquant lavie quotidienne des familles et des quartiers ouvriers, fut le seul a sentir que lacritique devait aller bien au-delà de la politique, comme on le verra après unepause de trente ans dans un autre courant conseilliste de dimensions bien plus
image/svg+xmlimportantes, le courant situationniste. Mais Otto Rühle, quant à lui, en arriva àfaire l’apologie de l’encadrement «extra-bourgeois» donné aux prolétaires parl’appareil productif capitaliste.En fait, jusqu’à ce qu’on en arrive à concevoir la classe ouvrièrecomme partie intégrée et intégrante du processus de reproduction de la sociétécapitaliste et qu’on en vienne à poser la révolution en termes qui échappent à ladivision en classes, la perspective suivra toujours le jeu des développements etdes mutations de la société capitaliste, sans rien caractériser d’autre que lescontradictions de classe comme les éléments du mouvement même ducapitalisme, de la dialectique du processus des métamorphoses perpétuelles de lasociété capitaliste. La critique révolutionnaire, se détachant de cette rationalitédialectique formelle (classe/capital – lutte de classe/conscience –crise/révolution) qui fait de la pensée radicale une source d’innovation originalepour l’autocritique du capital, saisira sa science comme facteur de lareproduction sociale et cherchera à reposer la révolution dans les termes duMarx de 1844, du communisme comme «la solution véritable du conflit entreexistence et essence, entre objectivation et autoaffirmation, entre liberté etnécessité, entre individu et espèce». Une telle critique – abandonnant le plan de la négativité etentreprenant immédiatement de repenser de manière positive et active larévolution, et par conséquent nous-mêmes – devra dépasser la séparation entrerationalité et affectivité. De plus, unifiant art et science, cette critique devra nierla société du capital en participant de façon créative à cette rupture finale avec levieux monde, rupture qui pourra engendrer une vie humaine et véritablementcommunautaire.
image/svg+xmlC’est sur cela que se fonderait aujourd’hui une visionrévolutionnaire; elle ne reconnaîtrait pas la critique du passé comme sa baseimmédiate. Toutefois, ce dépassement de la critique négative avancée par levieux marxisme de gauche, oblige à fixer la portée et les limites de l’archéologiedu communisme, problème qu’il faudrait reprendre une autre fois.Carsten JUHLCopenhague – Octobre 1973(Traduit de l’italien)
image/svg+xml1L’ouvrage de base pour la recherche historique sur la gauche de la révolution allemande estle Syndikalismus und Linkskommunismus von 1918-1923,Masenheim am Glan, 19169, de H. M.Block, dont sont essentiellement tirées les informations utilisées dans La gauche allemande et laquestion syndicale dans la III° Internationale, Copenhague, 1971, Kommunistisk Program, et dansLa gauche allemande (textes). Pour l’histoire du mouvement communiste en Allemagne de 1918 à1921,par Denis Authier, Paris, Brignoles, Naples, 1973. Même si le troisième texte Le KAPD et lemouvement prolétarien, Invariance, Nouvelle Série (série II), n°1, 1971, doit beaucoupd’informations à Bock, il est jusqu’à maintenant la seule analyse qui essaie d’aller au-delà desformes de représentation, en tentant de voir quelles ont été les aspirations révolutionnairescommunes à ce mouvement et aux courants les plus avancés des mouvements de révolte allemandset italiens de la seconde moitié des années 1960; il entreprend en outre – en partant de travauxprécédents – des formulations utilisables pour une nouvelle description du développementhistorique de l’économie capitaliste. Ce texte d’Invariance fait par là une périodisation de la sociétécapitaliste sur la base du passage de la soumission formelle à la soumission réelle du travail aucapital; enfin, ce texte abandonne le fétichisme de la classe ouvrière et pose l’alternative«communisme ou destruction de l’espèce humaine».2En tant que formes de médiation entre flux et reflux de la révolution, déjà battue pendantl’hiver 1918-19.3AAUD – Allgemeine Arbeiter - Union Deutschlands (Union Ouvrière Généraled’Allemagne), sympathisant avec le KAPD – fondée en février 1920. Scission en octobre 1921 avecla fondation de l’AAUE. AAUE – Allgemeine Arbeiter - Union Einheitsorganisation (Union Ouvrière Générale Unitaire). FAUD(S) – Freie Arbeiter - Union Deutschlands (Syndikalisten) (Union Ouvrière Libred’Allemagne (Syndicalistes)) – reconstitution de la vieille confédération syndicaliste en 1919. FAU (Gelsenkirchen) – Freie Arbeiter- Union (Gelsenkirchner Richtung) (Union Ouvrière Libre(tendance de Gelsenkirchnen)) – surgie en octobre 1920 après la scission dans la FAUD(S).Membre du Profintern de Moscou.
image/svg+xml4Dans An Essay on Liberation, (1969) H. Marcuse croit qu’il y eut d’autres dimensions. Ilrenvoie le lecteur aux textes Der Blau Reiterde F. Marc (1914) et Die Kunst und die Zeit, de R.Hausmann (1919), in Manifeste 1905-33, Dresden, 1958.5Publiés dans l’anthologie A. Pannekoek, H. Gorter. Organisation und Taktik derproletarischen Revolution, Krankfurt a/M, 1969, où H. M. Block décrit dans l’introduction,l’histoire et les théories de la Gauche Hollandaise. En français, respectivement dans Invariance,série I, n°7 et aux Cahiers Spartacus. 6KAPD – Kommunistische Arbeiter-Partei Deutschlands (Parti Communiste Ouvrierd’Allemagne) – fondé en avril 1920. Pour la théorie du KAPD sur son rôle, cf. Thèses sur le rôle duparti dans la révolution prolétarienne, Invariance, série I, n°8, 1969; en allemand, dans Partei undKlasse 1921, Kommunismusmen, 1972.7VKPD – Vereinigte Kommunistische Partei Deutschlands (Parti Communiste Unifiéd’Allemagne) – fondé en décembre 1920 par l’intermédiaire de l’unification du Parti Communisted’Allemagne (sous la direction de Levi) avec la gauche du Parti Indépendant. Section del’Internationale Communiste.8Cf. K. Marx à V. Zasulitjch, troisième ébauche, février-mars 1881; question reprise etdéveloppée plus tard par J. Camatte dans l’introduction à une édition française des textes d’AmadeoBordiga sur la question russe (cf. Invariance, série II, n°4).9Cf. I bolscevichi e la rivoluzione d’ottobre. Verbali delle sedute del Comitato centrale delPartito operaio social-democratico russo (bolscevico) – août 1917 à février 1918, Ed. Riuniti,1962. D’après le compte-rendu de Skripnik (p. 211), il est évident que les bolcheviks ont agi sous lapression d’une initiative révolutionnaire des ouvriers anarchistes de Pétrograd: la «direction»bolchevique du mouvement russe doit être considérée comme un compromis historique entrerévolution capitaliste bourgeoise et révolution capitaliste autogestionnaire, dont le caractèreprolétarien a dominé dans toutes les premières années (cf. les textes d’Anweiler, Brinton, etc.).
image/svg+xml10Entre la tendance dite d’Essen et celle dite de Berlin. 11La question de la conscience n’est pas traitée dans ce texte de Gorter. Elle l’était enrevanche dans la réponse de Pannekoek à Lénine Révolution mondiale et tactique communisteet demanière plus approfondie dans le texte de G. Lukacs Histoire et conscience de classe(1923),conception attaquée récemment par J. Baudrillard dans Le miroir de la production, Casterman,1973, pp. 135-36, théoricien d’un «structuralisme de gauche» qui critique «la rationalitéeschatologique» qui se trouverait dans tout le marxisme, coupable d’avoir fondé une notiond’histoire et de succession de modes de production sur lesquels on a érigé une nouvelle téléologie d’«autovérifications circulaires». 12Dans Von die bürgerlichen zur proletarischen Revolution, 1924, O. Rühle – bien quegestionnaire encore plus limité que Gorter dans sa vision du contenu du socialisme – comprit lepremier la victoire de la contre-révolution: «La révolution est perdue dès maintenant pour leprolétariat allemand». Même Rühle soutint que, le prolétariat dans sa majorité a été l’ «ennemi»,le «saboteur» et le «traître» s’opposant à «la libération et à la révolte de sa propre classe»; ilposa toutefois la révolution en termes de conseils ouvriers et jamais en termes d’autonégation duprolétariat.