Prélude

 


 

  Les maladies du système nerveux doivent être considérées comme des réversions de l’évolution, c’est-à-dire comme des dissolutions.

                                                                                                    Jackson

 

 

La dissolution du procès de connaissance et la fragmentation de l’appareil psychique en rapport intime avec la totalité du corps, engendrent toutes sortes de folies.


Mais cela ne se limite pas là. En fait toutes les maladies ont cette même cause, tant le fait psychique – la représentation – est déterminant chez Homo sapiens.


À l’heure actuelle ce phénomène concerne également le corps organique tant de notre  espèce que celui – à cause de notre intervention – de la multitude de celles qui opèrent dans le procès total de la vie.


On a dissolution de procès qui se sont instaurés il y a peut-être plus d’un milliard d’années, en ce qui concerne la cellule des eucaryotes, par exemple. Celle-ci en effet provient d’une symbiose entre différents êtres préexistants. Beaucoup de "maladies" actuelles sont dues à des dissolutions qui provoquent la libération de toutes sortes de particules vivantes dangereuses parce qu’elles activent à leur tour le procès de dissolution. Ceci est un exemple parmi une multitude. On peut dire que tous les procès qui s’enclenchent les uns en les autres et dont l’ensemble forme le procès de vie terrestre subissent une dissolution provoquant une séparation et une autonomisation des éléments.


D’où ressurgit l’antique question qui s’était activement posée lors des révolutions bourgeoises, sur le plan des rapports entre êtres fémino-humains, sur le plan politique : comment réunir ce qui a été divisé? Peut-il y avoir une autre communauté?


On l’a maintes fois montré, la solution qui fut donnée restait sur le plan même du procès de dissolution. On voulait, grâce à une médiation, réunir ce qui avait été divisé. La proposition d’œuvrer à la formation d’une communauté humano-féminine réintégrant la nature n’eut qu’un faible écho.


De nos jours, la faillite de toutes les solutions étatiques plus ou moins démocratiques ne fait plus de doute, de même qu’ont fait faillite les représentations religieuses, scientifiques. En ce qui concerne la science, elle a certes une efficacité énorme, mais elle opère au sein même d’un procès de dissolution. On ne peut pas à partir d’elle œuvrer à l’instauration d’une communauté qui nécessite le rejet de toute pensée séparée.


On se trouve donc  devant la situation suivant : une autonomisation de différents éléments qui prennent à tour de rôle une importance de premier ordre et, sur le plan de l’espèce elle-même, on constate que tout ce qui l’a constituée au cours de millions d’années, se dissout. L’imagination produit de la libération  des lobes pré-frontaux, dernier élément à intervenir dans la fondation de l’espèce, s’autonomise. D’un côté elle permet, grâce à la représentation qui envahit tout, de maintenir une unité, d’un autre côté elle renforce le mouvement d’autonomisation qui accélère le procès de dissolution.


Il ne s’agit pas seulement de savoir comment instaurer une communauté qui soit humano-féminine. On ne peut plus raisonner en tenant compte seulement de notre espèce, et la proposition de K. Marx : L’être humain est la véritable Gemeinwesen de l’homme est insuffisante. Tout anthropomorphisme est un obstacle à la régénération de la nature sans laquelle une nouvelle espèce, remplaçant Homo sapiens, ne peut pas apparaître; apparition qui, à son tour, permettra d’assurer la régénération.


Il nous faut saisir comment Homo sapiens s’est constitué et comment il a emprunté la voie qui l’a conduit au procès de dissolution actuel. À partir de là, il sera possible de bien concevoir le surgissement de Homo Gemeinwesen.

 

 


Janvier 1986